mardi 28 décembre 2010

on espère qu'il fera chaud cet été

Être célibataire à la fin décembre, -15 degrés dehors, 22 degrés dedans. Regarder par la fenêtre de l’appartement, dans Villeray, tout blanc. Rêver sans impatience au printemps dans un parc. Aux jambes nues d’une inconnue, sorties trop tôt sur l’herbe fraîche. Juste pour narguer l’hiver, pour lui donner le coup de grâce.

Elle porte encore ses bottes et des bas jusqu’aux genoux, un chandail de laine qui pique et qui cache le cou. On s’aime depuis 2 jours à peine, sur la pointe des pieds. Je me prends encore pour un courant d’air, qui soulève ses cheveux pour dérober un peu de parfum au creux de sa nuque. Elle sourit en regardant par terre, sachant très bien que je l’observe. Sa main se fraie un chemin à travers mon manteau pour se poser, toute froide, à la base de mon dos. Je rêve de faire pareil, découvrir sa peau comme un aveugle qui lit en braille, du bout des doigts, du bout des cils ou du bout des lèvres. En silence, on goûte le sable fin des premières caresses alors que s'écoule, à notre insu, le sablier des premiers instants. Lentement, elle tourne la tête pour lire dans mes yeux avec ses deux soleils. La télépathie est une chose à la fois vague et précise. Sans pouvoir dire tous les détails, nous savons que nous voulons rentrer, par un chemin plus ou moins court, coller nos lèvres et coller nos corps. Sa main quitte mon dos pour rejoindre la mienne et, sans se consulter, on se lève.

On espère qu'il fera chaud cet été.

lundi 6 décembre 2010

les romans qu'on écrit... et ceux dont on rêve toute une vie

Étrange la différence entre "ce que l'on désire" et "ce que l'on fait".

Hier, sur un blog qui me plait beaucoup, j'ai lu un billet qui s'intitule "Ce roman que je n'écrirai jamais".

Ce petit texte s'est présenté comme le morceau manquant d'un puzzle de l'une de mes nombreuses réflexions.

La majorité des gens que je connais (pour ne pas dire tous) sont aux prises avec quelques rêves inassouvis et, jusqu'à tout récemment, "ça me fâchait donc" de les entendre en parler!

Premièrement, ça me remettait en pleine face mes propres incapacités à matérialiser certains rêves et deuxièmement... si tu veux faire quelque chose, fais-le, mais FAIS-LE DONC!!

Attention! Je considère rétroactivement qu'un "fais-le donc" exaspéré n'est pas souhaitable MAIS, j'aimerais quand même souligner la part de positif qu'il contient.

Même mal exprimé, ce commentaire témoigne de ma confiance dans le potentiel de l'autre à réaliser un rêve. Si j'étais convaincu qu'il ou elle n'a pas les capacités pour le faire, j'essaierais de trouver le courage de le lui dire.

[Dans le cas de la blogueuse qui veut écrire un roman: Pourquoi qqun qui écrit plusieurs excellents billets par mois ne pourrait pas écrire un bon roman?! T'es pleine de talent, go!]

Récemment, les rêves inassouvis ne me fâchent plus. Je me concentre sur les gens qui m'inspirent, et j'essaie de leur dire pour qu'ils continuent de rayonner.

Pour ceux qui sont empêtrés... j'ai de l'empathie sincère mais pas de pitié. Ça fait partie du chemin, "être empêtré".

Comme je disais à la blogueuse:
Tirez-moi des roches, mais je pense qu'il est bon que certains rêvent meurent pour qu'on découvre "notre voie".

Si tu écris un roman un jour, la période actuelle en est une de gestation. Nécessaire.

Si tu ne l'écris jamais, la période actuelle en est une de deuil. Nécessaire.

À la fin, le talent et les autres importent peu. Si tu le fais, tu le fais. Si tu ne le fais pas, c'est que tu auras préféré faire autre chose... en tout cas je te le souhaite.

[Homer Simson: "Marge, I'm confused, is that an happy ending or a sad ending?"

Marge: "It's an ending, that's all."]

vendredi 3 décembre 2010

compte rendu de moustachu


Movember, novembre + moustache.

Pour ce qui ne le savent pas encore, novembre est un mois de sensibilisation au cancer de la prostate. J'avais décidé de me prêter au jeu, sans rien vérifier comme d'habitude, jusqu'à ce que mon petit frère fasse ça plus proprement en inscrivant notre équipe pour qu'on puisse amasser des dons.

Le truc avec une équipe officielle, c'est le but recherché et ça marche, c'est qu'on se sent autrement plus impliqué. Dès lors, plus le droit de faire marche arrière et "obligation" de faire de la promo.

Durant un mois, je l'ai portée partout, devant mes élèves de guitare, au badminton, à l'épicerie, au théâtre, au cirque, en show, à table, sur le web, partout.

Partout, j'ai pu apprécié le formidable concept de Movember. Partout, les gens qui me connaissent ou qui me reconnaissent seulement, m'ont parlé de ma moustache et je leur ai parlé de Movember et du cancer de la prostate en retour.

En me promenant seul dans le métro ou dans la rue, je continuais d'admirer le concept. Seul, on passe plus incognito - ce n'est qu'une moustache après tout - et pourtant, on y pense de temps à autre... en dévisageant un moustachu (fait-il Movember?), en ayant un regard entendu avec un moustachu (il fait Movember), en enviant un moustachu (bel ornement!), en se faisant sourire par une jolie fille (connait-elle l'existence de Movember ou elle me trouve beau de même?).

Durant un mois, j'ai été laid, beau, drôle, chicken (poc-poc-pocoooooc!) avec ma moustache reliée à mes favs, différent avec ma moustache à la Hulk Hogan, je me suis fait appelé Mario, Luigi, Pacini, Week-end chez Berni... j'ai même eu droit à un "Nice-Stache" d'un inconnu.

À voir nos réactions, celle du monde et la mienne, je réalisais à quel point porter une moustache est un "statement" dans certains milieux alors que c'était tellement normal pour les gars quand je travaillais dans les shops.

Cette semaine, mes derniers préjugés sont tombés. Après avoir été tellement gêné, après l'avoir portée en show seulement pour la cause, pour l'honneur et pour faire taire les "t'es pas game"... j'ai réalisé en la coupant que je me trouvais plus beau avec, l'habitude. Alors, j'ai chanté cette toune .

Une moustache! C'est rien qu'une moustache! "No big deal". Faites ce qui vous chante avec votre "pouel", y a des gens qui ont le cancer!

Et il me fait plaisir de lever mon chapeau à Movember un dernier coup, ma mini crainte de l'histoire était que le monde retienne plus les moustaches que la cause... mais non, on a ri, on a réfléchi et Movember a récolté près de 20 millions de dollars au Canada et près de 60 millions dans le monde!

Prenez le par le bout que vous voulez, je pense pas qu'il ait de perdants dans l'aventure. S'il y a des preneurs, après avoir essayé les styles "trucker" et "undercover brother", je rêve pour l'an prochain d'une équipe complète de "connoisseurs"!

jeudi 25 novembre 2010

quand on a que l'humour

S'il y a un brin de cynisme dans le jeu de mot du titre, n'allez pas retenir que ça. Prenez (impératif présent) 2 secondes pour lire cette courte réflexion.

En émergeant d'une période de "marde"(appelons un tas un tas), je réalise à quel point l'humour tient une place importante dans ma vie.

J'aime rire, des autres*, de moi et de presque toutes les situations, quelles soient drôles, cocasses ou désolantes! J'aime les incides jokes (mon berni), les running gags, les farces intelligentes, les jokes de pets (prout haha, ça fait toujours son effet... d'ailleurs ma théorie là-dessus est que l'humain s'est démarqué de l'animal lorsqu'il a commencé à rire de ses pets), l'absurde, la vulgarité, les jeux de mots, l'ironie (ironiquement les gens qui utilisent ce mot, l'utilisent souvent à tort), le sarcasme, les pinces sans rire** et le reste.

[Digression qui reviendra éventuellement sur la track] Étonnamment (ironiquement), j'admire peu d'humoristes; pas qu'ils ne soient pas drôles du tout mais je trouve que la densité et/ou la qualité des gags est souvent insuffisante pour des gens qui disent consacrer leur vie à l'humour. Mes "average funny folks" sont souvent aussi drôles que Louis Josée Houde et arrivent à mettre mon cerveau en état "d'extase humoristique" sur une base régulière pour 0$... merci boys and girls, j'adore être entouré de gens drôles!

[Et nous voici revenu sur le droit chemin et au coeur même du sujet du billet] Je crois que l'humour peut presque être considéré comme "un mode de vie". Pratiqué sur une base régulière, c'est une arme à la fois formidablement gentille et puissante pour balancer tous les mystères, les malheurs, les défauts, les malchances que l'on rencontre au cours d'une vie saine et normale. Il y a des moments où l'humour est la seule prise qu'on ait sur quelque chose qui nous dépasse...

Ce n'est pas donné à tout le monde d'être drôle (hep) et "une chose drôle", c'est bien relatif... mais pour moi, toute personne qui arrive à rire de bon coeur* porte un genre de lumière (WHOOAAA).

Euh... ben c'est ça là... circulez!

Pis oubliez pas L'incontournable Mister Boy

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*Rire de bon coeur VS rire de mauvais coeur.

Malheureusement à l'occasion, certaines personnes risent (ou rillent, comme ça vous chante) de mauvais coeur.

Rire de la détresse des autres, "cé chien". Pour toutes les fois où j'ai fait mal à qqun en croyant que c'était encore drôle, je m'excuse et je travaille sans relâche (tousse-tousse) à délimiter la frontière du risible.

Un rire noir ou jaune à l'extrême peut ne plus être porteur de bonheur et ça, c'est vraiment triste. Si vous connaissez qqun qui n'a plus qu'un rire désespéré, aidez-le.

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**En matière de pince sans rire, je cite à comparaître le grand maître en la matière, Étienne Bordeleau, avec qui j'ai fait de la musique.

Anecdote 1:
Il gardait dans son porte-feuille une photo de la fille la plus moche qu'il ait pu trouvé et, lorsque venait le temps de montrer une photo de "sa blonde", il la sortait le plus sérieusement du monde et cherchait l'approbation de son interlocuteur en disant: "Elle est belle! hein??"... malaise total!

Anecdote 2:
À l'époque où l'on se connaissait peu, lors de l'un de nos premiers soupers de band... chacun s'informe sur la famille des autres et qqun demande: "Toi Étienne?".
- Moi mes parents sont morts quand j'avais 5 ans...
... (malaise)
- Ben non, c't'une joke.

Anecdote 3:
Je cherche mon accordeur de guitare dans le local de pratique et les gars ont l'air plus ou moins attentifs à mon problème...

5 minutes plus tard, Étienne se penche pour ramasser son trombone et demande: "Y a-tu qqun qui a perdu un accordeur?".
- Oui!! (super enthousiaste pcq je suis certain qu'il vient de le trouver)
- Ah, je l'ai pas vu.

Anecdote 4:
Qqun dans une auberge de jeunesse à Tadoussac: Avez-vous vu André?
Étienne: Y est parti prendre une marche dans le bois!
Tous sauf Étienne: BAAAAAAAAA-HA-HAAAAAAAAAAAAAAA!!!!

(André est en fauteuil roulant... et il a le sens de l'humour.)

lundi 15 novembre 2010

faux bond?

Mon dernier billet, "l'effet trampoline", était une réflexion à propos du fait qu'une chute vertigineuse entraîne peut-être un rebond équivalent ; sous-entendant que la période chute était terminée et que l'ascension s'amorçait...

Le lendemain, mon ex m'annonçait qu'elle rentre à Montréal de son voyage d'un an et demi qui devait durer 6 mois. Un courriel, ma belle rémission... une pichenotte à la base d'un château de cartes. L'espoir est revenu, la peine aussi et un million de questions.

Après un moment de tergiversations, je l'ai forcée à me dire ce dont j'avais besoin pour tuer l'espoir: elle a un nouvel amoureux. Après quelques mois seulement, un an max, elle se demande si elle veut allez vivre avec lui en France ou l'inviter à vivre au Québec... elle qui avait de la difficulté à accepter la clé de mon appartement à l'époque.

Je me voyais déjà replonger, pour aller vérifier si le baril n'avait pas, tout compte fait, un double fond.

Mais voilà, 10 jours ont passé déjà et je constate que je ne vais pas moins bien qu'avant de savoir... le petit retour de peine est largement compensé par LA CERTITUDE.

Toute seule avec elle-même, mon ex est déjà une fille floue. J'ai donc passé des mois dans l'incertitude, un peu par sa faute, un peu par la mienne... parce qu'elle voulait pouvoir revenir en arrière si devant n'était qu'un mirage... parce que je l'espérais, en dépit des signes.

J'ai décidé de limiter au minimum les contacts pour un moment... mon deuil prend une nouvelle tournure... pas qu'agréable, mais nécessaire... il commence pour vrai et j'ai l'impression de franchir un passage obligé.

Mon coloc, qui s'amuse à comparer la peine d'amour à une peine carcérale, me disait ceci:
"Le temps que tu as fait avant de clarifier la situation compte simple... à partir de maintenant, ça compte double... et si tu continues de bien te comporter, tu pourras probablement être relâché au deux tiers de ta peine!"

[Il ne lit pas de blogs et ce genre "d'insignifiances" (sourire) mais MERCI Bruno, pour ton humour et ta présence, que ça te soit rendu d'une manière ou d'une autre!]

J'ai craint le pire et j'en suis quitte pour quelques larmes de plus et un feeling général nettement plus agréable que l'incertitude. Faux bond? Je crois que non...

Je continue de bien me comporter donc, parce qu'être relâché aux deux tiers de la sentence, ça se prendrait!

jeudi 21 octobre 2010

l’effet trampoline

Un ami à moi écrivant à propos des ruptures affirmait que plus on a aimé fort, plus on se pète la gueule, théorie qu’il résume adroitement en une phrase :
« La chute est à la hauteur de l’ascension ».

Supposons qu’il ait raison et que le fond du baril soit élastique… je me demande si la théorie fonctionne à l’inverse, lorsqu’on refait surface à nouveau. Se peut-il qu’une solide chute entraîne un élan proportionnel?

La question n’est nullement désintéressée puisque les preuves corroborant cette hypothèse commencent à se multiplier dans mon cas.

Lors d’un bilan de vie à la fin du mois de mai, je constatais qu’en un peu plus d’un an j’ai perdu : ma blonde, mon band de compos, un important contrat de musique, un job de rédaction et un site pour écrire mes trucs plus délurés… le fond du baril était plutôt tendu.

En juin, j’ai appris que mon contrat de musique serait tout de même honoré jusqu’à la fin de l’année. Puis, on m’a offert de faire un spectacle de mes chansons. J’ai ensuite commencé à publier moi-même mon web roman absurde. Peu après, un petit contrat de rédaction et des offres d’entrevues me sont tombés du ciel. Je n’ai pas obtenu de poste, mais peu importe. Récemment, j’ai commencé à rejouer mes chansons avec des amis dans un nouvel état d’esprit, ça n’a jamais si bien sonné. Il y a deux semaines, le gérant et le patron du bar où je fais de la musique nous ont appelé coup sur coup… il semblerait que la décision de ne pas renouveler le contrat soit une erreur : deux shows de bookés en janvier et la porte est peut-être ouverte pour plus. Ce matin, la rédactrice en chef du magazine m’a proposé un premier article depuis 2009 et la semaine prochaine, je refais un spectacle de mes chansons devant des vieux chums et des nouveaux.

Plus on tombe de haut, mieux on rebondit? C’est possible?!
Si c’est le cas, la prochaine fille que je fréquenterai n’a qu’à bien se tenir!

mercredi 22 septembre 2010

la mère de tous les vices

Mardi au milieu de la nuit...
je me réveille avec la peur au ventre,
en pensant encore à elles.

Elle, mon ex.
Elle, la peine.
Elle, l'oisiveté qu'elle génère.
Elle, la culpabilité qui vient avec.
Elle, la peur de l'oisiveté.
Elle, que j'essaie de ne pas élever au rang de phobie.

Je me suis cherché souvent dans ma vie, mais je ne suis pas habitué à m'ennuyer, à avoir envie de rien et à craindre la solitude. Avant cette peine, mes moments d'errance demeuraient créatifs...

"J'envie tellement les gens affairés
Moi aussi j'veux une raison d'être pressé
Mais j'ai l'impression qu'à l'arrivée
La vie n'est qu'un mirage ensoleillé"
(Jamais Faker, 2004)

À cette époque, même quand je ne savais plus où j'allais, je fabriquais encore quelque chose, j'avais des musiques et des mots dans l'âme.

Ces temps-ci, mes meilleurs moments de solitude me sont offerts par facebook et par les blogs des autres. J'espère sans cesse que mes pushers favoris me fournissent quelque chose, allant d'un vidéo drôle aux billets plus substantiels. Je les consulte matin-midi-soir, au gré de mes temps libres, jusqu'à ce qu'ils s'éteignent les uns après les autres, jusqu'à ce qu'ils reviennent le lendemain.

Je spécifie "au gré de mes temps libre", pour faire baisser le degré de culpabilité et me garder de l'espoir: j'ai beaucoup de plaisir à faire des trucs avec les autres, à voir des amis, à travailler... c'est la solitude que je redoute!

Je me demande à quel moment l'oisiveté devient mère de tous les vices?

Je voudrais arrêter de critiquer mes échappatoires, me laisser droit à cette période floue, faire taire la voix qui, non seulement, m'ordonne de "faire quelque chose", mais qui, en plus, me sermonne sans cesse sur le bien-fondé de ce que je suis en train de faire.

Le bien-fondé... pfffft! Avoir envie de quelque chose, n'est-ce pas déjà suffisant?

J'espère qu'avec le recul, je me rendrai compte que les petits gestes que je pose au fil des jours m'auront aidé à sortir de cette période difficile pour me plonger dans un nouvel épisode palpitant (et watchez ben la quétainerie qui s'en vient) du grand livre de la vie!

samedi 11 septembre 2010

le néphrologue

Chaque famille, aussi belle soit-elle, a ses problèmes de santé spécifiques. Chez nous, c’est les reins. Mon arrière-grand-père et mon grand-père ont eu des problèmes de reins, mon père a des problèmes de reins, moi, mes futurs enfants et les leurs auront, selon toute vraisemblance, des problèmes de reins. Une tradition plusieurs fois centenaire, un héritage, un legs, une lignée d’insuffisants rénaux !

Le problème, c’est que durant toutes ces années on a ignoré que nous étions les fiers porteurs de cette tare génétique. Nous pensions être, selon les époques, d’ordinaires cancéreux, diabétiques, pris du coeur, lépreux et autres. Parce qu’en fait, aucun de nous n’est vraiment mort de ses problèmes de reins… mon grand-père y est presque arrivé mais au bout du compte, il y a toujours eu quelque chose d’autre pour nous emporter et voler le titre à l’insuffisance rénale.

Cependant, la science qui n’est jamais à court de surprise et d’imagination a éradiqué la lèpre, posé des pace-makers, contrôlé le diabète et prolongé les cancers tant et si bien que mon père a été épargné par tous ces malheurs.

C’est donc sans faire exprès, lors d’un contrôle de routine qu’on lui découvrit un alarmant taux de protéines dans l’urine.

On l’envoya chez le néphrologue -le spécialiste du rein- et on lui dit à peu près ceci :
« Les reins sont au nombre de deux et sont le filtre du corps. Ils envoient dans l’urine tout ce dont vous n’avez pas besoin et que vous auriez consommé en trop grande quantité : potassium, sodium, vitamines et déchets variés.
Ce sont des organes vitaux; sans eux vous seriez déjà mort.

Ce sont aussi des organes très puissants, vous savez Monsieur que de nombreuses personnes n’ont qu’un seul rein qui fonctionne et ne s’en apercevront jamais parce que celui qui marche se claque tout le travail.

Un problème comme le vôtre est héréditaire. Vous comprendrez maintenant que plusieurs symptômes de maladie de votre père que l’on imputait à son coeur et à son âge sont en fait des problèmes de reins non diagnostiqués. Il en va de même pour votre grand-père, votre arrière-grand-père et son père avant lui.

Dans votre cas précisément, vous êtes à 41% de capacité rénale… nous n’envisagerons ni greffe ni dialyse avant que vous tombiez sous la barre des 20%.

Comme nous ne savons pas réellement comment guérir ce problème, vous mangerez quelques pilules choisies au hasard dans notre pharmacie. »

Mon père fit cela durant quelques années mais sa capacité rénale continuait de chuter. Lors d’une autre visite, son néphrologue lui fit part d’une récente découverte :

« Il paraît que l’huile de saumon peu stopper la baisse de capacité rénale. Ainsi, mangez-en en quantité phénoménale, 12 capsules par jour pour être exact, jusqu’à ce que vous fassiez des rots au saumon, des pets au saumon et que votre haleine sente le saumon. On verra ce que ça donne… et achetez de la gomme. »

Après quelques mois, ils constatèrent avec autant de plaisir que d’incrédulité l’efficacité du traitement : 33% de capacité rénale, stable.

« Monsieur, je suis très content de vous annoncer que vous mourrez peut-être d’autre chose! »

Ce matin, je suis allé au CLSC pour prise de sang et échantillon d’urine sur recommandation de mon médecin. Avec mes antécédents familiaux, mieux vaut prendre des précautions. Au besoin, elle m’enverra chez un néphrologue, a-t-elle dit.

La pression est forte. Une tradition familiale plusieurs fois centenaire. Et fraîchement découverte, de surcroit. Dois-je la perpétrer, enfin lui donner l’importance historique qu’elle mérite ou oublier toute cette histoire de néphrologue et mourir d’une maladie plus conventionnelle?

[La triste nouvelle, c'est que j'ai écrit ça il y a longtemps et que mon père est en ce moment en dialyse et en attente d'une greffe. La bonne, c'est que non seulement, ça améliore ça qualité de vie mais ça le garde en vie!]

jeudi 9 septembre 2010

mon cher Matthieu, c'est à mon tour

D’un vieux chum à un autre, en réponse à ton billet.

Je suis dans un de ces moments où je préfèrerais te faire une bonne accolade plutôt que d’écrire... parce que c'est une chance de te connaître!

On n’est pas le yin et le yang tout les deux, mais c'est clair que notre amitié se nourrit beaucoup de nos différences.

Homme de tous les excès, il n'y en a qu'un dans lequel tu ne me battras jamais: l'excès de tempérance.

Je sais, l'excès et la tempérance ne vont pas de paire. Pourtant, je choisis le mot avec soin, tempérance: la vertu qui modère les passions et les désirs.

La tempérance, pile entre l'austérité et l'abus.

Autant j’en suis fier, autant j’en ai honte, autant j’en bénéficie, autant j’en souffre… mais les sentiments que j’éprouve ne changent rien à l’affaire, je suis tempéré.

On me reproche rarement de "ne pas" ou de "trop"... on me reproche plutôt de "ne pas assez".

Être tempéré, c’est être à la fois bon et fade, c’est être souvent brillant, sans être éblouissant et c’est oser, sans s’abandonner.

Je travaille fort pour assouplir le cadre. Parce que l’excès de tempérance lui enlève son côté vertueux.

Et c’est à ce moment que tu interviens, avec ta fougue et ton intelligence, avec ton extravagance et tes excentricités, avec ton narcissisme et ton dévouement, avec tes passions sincères et contagieuses et ton grand amour de merde…

Il faut une personnalité formidable et complexe pour amener l’être tempéré que je suis vers d’autres pôles.

Tu as tout vu et grâce à toi, j’ai droit d’accéder à l’extase comme à la déchéance, à la perfection comme à l’erreur en sachant que tu ne me jugeras pas, ni dans mes bas fonds, ni dans mes grandes aspirations, que tu m’y pousseras si je veux y aller et qu’au besoin même, tu ferais un pas plus en avant dans n’importe quelle direction pour que je ne m’y trouve pas seul.

À cause de la confiance et du respect que je te porte, je le suivrai ton conseil; la prochaine fois que je tombe amoureux d’une femme, je nous ferai cadeau d’une promesse incertaine mais sincère : félicité éternelle!

Pour notre date d’anniversaire d’amitié, je te propose le 8 septembre. Why not? On devait commencer la garderie!

Ton ami et ton frère aussi,
François


PS : Mon amie Geneviève a sa façon bien à elle de décrire ma tempérance : « François, tu chill mais tu chill pas tout à fait ». Si tu permets, je lui dédie aussi une partie du billet par la bande, parce qu’elle joue aussi ce rôle de « mentor de l’audace ».

dimanche 5 septembre 2010

"peine" in the ass (un très court essai sur la peine d'amour et le deuil)

Y a le bon vieux Fred qui chante:
"Peine d'amour, peine de mort
Peine d'avoir srappé son char
Un peu de peine ça fait d'mal à personne
Tant que tu sais où c'est t'la mettre..."
(Dérape: Fred Fortin)

La peine d'amour, je l'ai vécue, je la vis encore, je l'ai lue sur des blogs, j'y ai pensé, je l'ai écrite, j'en ai jasé avec des amis, avec des parents, sur mon balcon, sur le leur, au resto, dans des partys, au coin d'une table, au coin d'un feu et, en mettant bout à bout toutes les théories, les expériences et les prédictions, j'en arrive à ces conclusions (un peu simplistes peut-être, mais c'est toujours ça de pris):

Une vraie peine d'amour est une peine (tiens donc) qui dure tant qu'elle dure (hé ben) jusqu'à ce qu'à, un moment donné (au bout d'un an en général), on ait fait le tour.

En attendant, elle marche conjointement avec la vie jusqu'à se diluer complètement dans celle-ci.

Ensuite seulement, on peut ré-ouvrir le coffre-fort à souvenirs marqué du sceau de l'ancienne flamme et voir enfin la relation d'un oeil plus lucide, avec ce qu'elle avait de grandiose et de moche, et se dire: "Je sais pas trop comment, mais je suis passé à travers."

samedi 17 juillet 2010

sous la froidure

sous la froidure
des vestiges de tornade
une maison brûlée
une fille en voyage

sous la froidure
je m’accroche
les yeux fermés
à ce que tu arraches

sous la froidure
mon cœur en lambeaux
en route vers l’urgence
dans un sceau de glace

sous la froidure
je me retiens
sous la froidure
je te perds

sous la froidure
je te pleure à couvert
pour que tu ne portes pas
tout le poids de ma peine

sous la froidure
l’homme et les promesses tiennent
sous la froidure
je reste le même

je te comprends malgré tout
et malgré tout, je t’aime
mais je dois survivre un peu
sous la froidure

samedi 26 juin 2010

enfin la rage

Ça aura pris quelques mois. À 4h00 cette nuit, je me suis réveillé avec l'envie de tout démolir. Les meubles, la vaisselle, les livres, les murs, les choses fragiles ou belles, le neuf, le vieux, les souvenirs. Réduire en miettes jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de nous deux. Plus de toi. Plus rien. Plus jamais.

Je n'étais pas à la maison. Ça urgeait. J'ai rampé par la porte de derrière. J'ai couru comme un défoncé jusqu'au parc en me saignant les poumons et en pleurant de la bile.

Dès que j'y ai été, j'ai arraché tout ce que j'ai pu pour battre tout ce que j'ai trouvé, les arbres, les fleurs, la nature, le béton, les poteaux de métal. Et si j'avais pu attraper quelque chose de vivant, j'aurais voulu. Arracher des ailes, des pattes. Crever des yeux. Faire mal.

Le gros de la crise passée, j'ai continué par soubresauts à casser du bois, lancer des pierres ou des branches dans l'eau ou n'importe où. Avec un bâton, j'ai frappé au hasard. J'ai renversé ce qui se renversait sur la promenade piétonière.

J'ai croisé un homme avec son chien. Il m'a salué. Le chien avait peur. Moi aussi. Ne pas se provoquer. Pour de pas se tuer sur place. L'instinct.

Le chien a détourné le regard. J'ai respiré.

Un peu plus loin, j'ai trouvé une couleuvre morte couverte de fourmis. J'ai écrasé sa tête avec mon pied. Bruit liquide. Les fourmis grouillaient et revenaient sur le cadavre. J'ai eu un frisson.

...

Je ne sais pas à quelle étape du deuil vient la colère. Je serais prêt à parier que je fais les choses dans le désordre. C'est le chaos. C'est normal. Merci les arbres, merci le chien, la couleuvre, les fourmis. Excusez-moi, j'étais plein de plomb fondu. Il était temps. Et on a évité de faire pire.

jeudi 17 juin 2010

sunny side up

Ces derniers temps, j’ai plutôt flirté avec le côté obscur de la force mais ce matin, je prendrai mes œufs sunny side up et un verre de jus à moitié plein plutôt qu’à moitié vide.

Le patron du bar, en nous annonçant que notre contrat ne sera pas reconduit l’an prochain, nous a tout de même complimentés pour notre travail et nos efforts et n’a pas rompu le contrat en cours. 6 mois de sursis… la vie a fait son bout de chemin en fin de compte.

Beaucoup plus de gens que je ne l’imaginais sont sensibles à mes déboires et le manifestent de toutes sortes de manières. Gratitude immense et sobre, pour ne pas gâcher l’instant. Un merci sincère comme un profond soupir de soulagement.

En fin de semaine, en prenant la route avec le band, j’étais partout en même temps. Je reprenais la route pour toutes les places qu’on a déjà visitées et celles qui nous reste à voir. J’avais le sourire dans le cœur, content d’être avec ces gars là, pour aller jouer cette musique là. On peut pas se le dire, mais on s’aime.

À notre retour, il y avait un message dans la boîte de réception de notre site :
« (…) Je vous ai vus la première fois il y a 2 ans et j'avais été totalement renversée, touchée et je n'avais qu'une envie, c'était d'avoir une autre occasion, le plus vite possible, de vous revoir... Ça a pris 2 ans avant que cette occasion ne se présente... Et j'ai ressenti le même plaisir, le même enchantement, le même envoûtement que la première fois... Je crois que le paradis, pour moi, ça doit un peu ressembler à ça... Un genre d'état de grâce...

Bien sûr, il y a l'oeuvre de Dédé, que j'adore. Mais c'est beaucoup plus que ça, j'ai entendu d'autres gens chanter Dédé et les Colocs et ça n'avait rien, mais vraiment rien à voir avec l'énergie, la magie, le courant qui passe entre vous et le talent, l'immense talent qui se trouve en chacun de vous et qui forme un tout indescriptible qui touche le corps, le coeur et l'âme...
»

J’ai envoyé un mot de remerciement. La réponse à mon message de deux lignes est aussi, et surtout, une réponse à dix ans de remise en question quotidienne :
« Merci d'avoir pris le temps de répondre à mon message, c'est vraiment un geste plus que gentil... Je l'apprécie énormément, surtout, ne change pas, tu es un être particulier, un être de lumière, avec une énergie et un sensibilité hors du commun et aussi une grande générosité sur scène... et ça, c'est rare, vraiment rare... N'arrête pas la musique et la scène, on y perdrait beaucoup et toi aussi, je crois... »

Le Big Fucking Worl Wide Web a fait plus qu'amande honorable sur celle là. Et comme un prolongement de tout ça, par un bien curieux concours de circonstances, voilà que ce soir, je rejouerai mes chansons!

Évidement, avec une seule journée de préparation, j’ai un peu peur de comment ça va se passer. Mais je déteste bouder la vie, dès qu’elle fait un élan vers moi, j’ai envie de lui pardonner ses vacheries et d'ouvrir les bras.

J’ai shiné mes chansons tristes. Tant pis si elles détonnent avec l’endroit et le groupe qui va suivre. Je serai là. Aussi entier que je peux l’être. Mes ombres dans une main, ma lumière dans l’autre… open mic, open mind, open heart : sunny side up.

dimanche 30 mai 2010

les tuiles s'accumulent

Il y a deux ans, j’ai abandonné mon projet de compos. Décision difficile que j’ai pourtant presque prise sur un coup de tête, m’apercevant subitement que l’élan ne suffit pas si le cœur est à la traîne.

Ensuite, il y a eu la fermeture de mon site favori. Infime incident sur le Big Fucking World Wide Web, il a eu sur ma vie des répercussions majeures puisque je me retrouvais du jour au lendemain sans vitrine pour la création, moi qui carbure fort à l’intérêt qu’on porte à mon travail.

Quelques mois plus tard, c’est ma collaboration avec le magazine qui se terminait. La faute à la crise, m’a-t-on dit. Depuis, je ne suis plus payé pour écrire.

Puis, coïncidant avec le déménagement de mon frère et de sa copine à Sherbrooke, il y a eu le départ de ma blonde pour la Hollande ; ce qui a mené à la rupture dont j’ai déjà assez parlé.

Dans tout ça, je n’ai à peu près rien dit de mes proches, ils sont pourtant loin d’être au sommet de leur forme.

Et voilà qu’hier, le gérant du bar qui emploie mon band depuis deux ans nous annonce gentiment qu’on est probablement clairés. Faut encore attendre l’appel du boss, mais mon instinct se bouche déjà le nez tellement ça pue. 25 shows de moins par année. Et tant pis pour le contrat, ça s’utilise à sens unique, celui du patron. On a aussi vu à nous préciser que depuis un mois, on n'est pas à notre meilleur. Ah, tiens, vous aviez remarqué? Ma blonde m’a laissé un matin de show.

Les tuiles s’accumulent. J’ai la tête dure, mais avec un genou par terre, j’avais vraiment pas besoin d’un autre coup de pelle en pleine poire. Il commence à être flou le film de mon existence, et je vois de très près le plancher du ring. L’arbitre des crie choses, mais sa voix se perd dans la terrible résonance du World Wide Gong.

Je me suis démené pour ce projet là. Je me suis démené pour tout. Et partout, PARTOUT, on me dit la même chose : « t’es vraiment bon, MAIS… ».

À force d’être « vraiment bon MAIS », on fini par se demander si on sera jamais assez vraiment bon et si ça vaut vraiment la peine de s’investir dans quoi que ça soit.

Ma plume de plomb ne vole pas haut. Pourvu qui pleuve pas, je serais trop lourd pour flotter.

Alors, je prends un pacte avec la vie : crisse-moi la paix pour quelques mois, le temps de me refaire une beauté, perds mon numéro, vas fesser ailleurs, emmerder quelqu’un d’autre, prends des vacances, je suis écoeuré là.

Et pendant que tu prends les requêtes, donne donc congé aux haïtiens et fais fermer les usines de marées noires. Tout le monde se force, fais ta part.

Et si tu fais encore dans le miraculeux, on attend l’appel du patron du bar cette semaine.

J’ai l’espoir tenace, mais, câââlice…

By the way, appelez-moi pas personne, je m’en vas me coucher!

samedi 29 mai 2010

Inès

Inès, c’est ma voisine d’en bas à droite. Une chilienne de 82 ans. Cette femme là, c’est toutes les grands-mamans du monde en une seule, et l’humanité tiendrait au complet dans son cœur sans être à l’étroit.

En descendant faire des courses, je la croise sur le pas de la porte. Elle est revenue avant-hier d’un voyage d’un mois dans son Chili natal, épanouie, comblée, belle en dedans comme dehors. Je la soupçonne même d’être un peu plus jeune qu’à son départ.

En un mois, elle a manqué ma petite catastrophe, mon gouffre abyssal à moi tout seul, ma rupture. C’est avec son infinie gentillesse qu’elle me demande des nouvelles d’Elise et qu’elle devine dans ma réponse concise tout ce que j’ai à lui dire. Alors, elle me serre dans ses bras, tout bonnement. Pas de pudeur, pas de retenue et surtout, pas de malaise. Moi, j’ai envie de pleurer de joie et de peine tout en même temps. Tout ce que j’ai pu essayer d’expliquer, elle le sait. Ce que j’ai vécu et ce qui me reste encore à passer, elle le sait. Et la part de réconfort que je me refusais encore, elle me l’offre. Délivrance.

Comme si ça ne suffisait pas, elle en rajoute : « Mon plou grand fils lui a cinequante-houit ans, tou es comme oune petit-fils. ».

Là-dessus, je l’aide à porter ses paquets jusque chez elle. Elle m’annonce qu’elle passera bientôt me donner des empanadas. En la quittant, je lui dis de prendre soins d’elle et elle me répond avec son sourire de vieille dame qui n’a rien à craindre de rien: « Non, tou prends soins de toi. ». Allez donc la contredire.

samedi 15 mai 2010

roulette

j’ai aimé comme un joueur compulsif. mon cœur sur le 7 rouge.

je sais aimer. imparfaitement. mais de mon mieux quand même. je peux me donner pour vrai. croire au présent. être entier. être là.

maintenant, j'ai peur d'être abîmé par la rupture.

j’ai aimé comme un joueur compulsif. miser mon cœur est une chose que je fais bien, le reprendre... je sais pas comment.

jeudi 13 mai 2010

capsules de sauvetage

presque un mois déjà.

s'accrocher à la vie en laissant partir le bonheur pour un moment, ce n'est pas simple.

les mots et le corps ne s'entendent pas. malgré toutes les preuves qui s'accumulent. les cadres brisés. les amis qui tendent les bras. les prises de décision. nouveau coloc. nouvelle vie. y a ma peau qui t'attend encore. y a ma tête qui reste en arrière.

en attendant, la vie tire les ficelles sans aide comme si elle-même refusait de se perdre, de se laisser gaspiller par la tristesse.

un jour tu reviendras de la lune dans une capsule. les gens t'attendront avec des fleurs. personne ne saura vraiment ce qui t'est arrivé. je te verrai à la télé et j'aurai l'impression de tellement te connaître. j'espère que je serai moins vide alors.

dimanche 25 avril 2010

la part de l'autre (l'amitié)

Voici une petite bribe d'un auteur que j'aime. Ceux qui disent que les romans sont une perte de temps... je suis triste pour vous.

À mes amis, merci d'être là à tous les moments.
À Elise, je pense qu'on a souvent eu la chance de transcender l'amour qui est décrit ici... c'est tout à notre honneur.

Pour les allusions au départ, le gars s'en va à la guerre, ne vous inquiétez pas pour moi (maman!).

"Mes amis, j'écris ce petit mot pour vous dire que je vous aime, que je pars avec la fierté de vous avoir connus, l'orgueil d'avoir été choisi et apprécié par vous, et que votre amitié fut sans doute la plus belle oeuvre de ma vie. C'est étrange l'amitié. Alors qu'en amour, on parle d'amour, entre vrais amis on ne parle pas d'amitié. L'amitié on la fait sans la nommer ni la commenter. C'est fort et silencieux. C'est pudique. C'est viril. C'est le romantisme des hommes. Elle doit être beaucoup plus profonde et solide que l'amour pour qu'on ne la disperse pas sottement en mots, en déclarations, en poèmes, en lettres. Elle doit être beaucoup plus satisfaisante que puisqu'elle ne se confond pas avec le plaisir et les démangeaisons de peau. en mourant, c'est à ce grand mystère silencieux que je songe et je lui rends hommage.

Mes amis, je vous ai vus mal rasés, crottés, de mauvaise humeur, en train de vous gratter, de péter, de roter, de chier des diarrhées infinies, et pourtant je n'ai jamais cessé de vous aimer. J'en aurais sans doute voulu à une femme de m'imposer toutes ces misères, je l'aurais quittée, insultée, répudiée. Vous pas. Au contraire. Chaque fois que je vous voyais plus vulnérables, je vous aimais davantage. C'est injuste n'est-ce pas? L'homme et la femme ne s'aimeront jamais autant que deux amis parce que leur relation est pourrie par la séduction. Ils jouent un rôle. Pire, ils cherchent chacun le beau rôle. Théâtre. Comédie. Mensonge. Il n'y a pas de sécurité en amour car chacun pense qu'il doit dissimuler, qu'il ne peut être aimer tel qu'il est. Apparence. Fausse façade. Un grand amour, c'est un mensonge réussi et constamment renouvelé. Une amitié, s'est une vérité qui s'impose. L'amitié est nue, l'amour fardé.

Mes amis, je vous aime donc tels que vous êtes."

Éric-Emmanuel Schmitt, La part de l'autre

jeudi 25 mars 2010

confidence pour un oiseau

Ce matin je t'ai regardé dormir. Dehors, le vent soufflait des bruits de fantômes et de tempêtes, des bruits d'âmes errantes, captives sur terre malgré tout l'espace.

Ce matin je t'ai regardé dormir et les racines complexes de toi et moi vibraient sourdement, enchevêtrées, profondes, vraies; réveillant à la fois ma peine face à ton départ, mes envies romantiques de ne t'écrire que de belles choses et ma reconnaissance toute simple... être là, à ce moment là.

Ce matin alors que j'écrivais ces lignes, tu es venue me rejoindre au salon et te blottir contre moi, petite et grande. Te blottir contre moi comme s'il n'y avait aucun endroit plus réconfortant au monde. Te blottir contre moi, une minute à peine, puis tu t'es relevée comme si tu avais déjà fait le plein.

J'ai attendu que tu reviennes, mais non, tu avais bel et bien fait le plein. Et au moment où j'ai cessé de t'attendre, tu es revenue... et repartie dans la seconde.

Tu appartiens au règne animal, je suis un arbre.

Tu connais la vraie faim, la vraie soif, le vide, la satiété, la peur et le désir. Je me nourris d'eau et de lumière et je grandis même sans que l'on s'en aperçoive.

Je pousse lentement, de plus en plus haut vers le ciel, et pourtant, l'insecte ou l'oiseau sur ma cime se tiendra toujours légèrement plus près du soleil.

Si tu veux, je ne sais pas, devenir un oiseau avec de grandes racines...

Mais moi je veux bien, être un arbre avec des ailes.

dimanche 21 février 2010

flirter avec la sérénité

Quand mes peurs peuvent exister sans m’empêcher de sourire,

quand je suis heureux de m'être donné le temps et l’espace dont j’ai besoin pour me comprendre sans être déçu d’être passé mille fois par les mêmes chemins,

quand je suis fier d’être patient, minutieux, perfectionniste, dévoué et investi sans demander aux autres de me ressembler,

quand je me sens solide sans être rigide,

quand je suis une plante qui peut croître sans avoir besoin d’étouffer la concurrence,

je tiens l’équilibre.



Quand je n’aurai plus besoin de l’écrire,

je tiendrai la sérénité.

jeudi 21 janvier 2010

« faire un homme de soi »

Ce matin, j’ai fait un homme de moi.

Dans mes rêves, j’ai tendance à magnifier l’expression. Faire un homme de soi. Grandir dans des actions d’éclats. Devenir un héro.

Dans la vraie vie, l’occasion se présente, toute simple et presque conne… elle nous demande au moins autant d’humilité que de courage. Avouer sa petitesse, chier dans ses culottes et foncer quand même.

Ce matin, j’ai fait un homme de moi en ayant une discussion que je ne voulais pas avoir.

Je me suis fait du mauvais sang durant deux jours, j’ai cherché des moyens d’esquiver et j’ai maudit la vie de me placer dans une situation intenable : une discussion normale d’un quart d’heure entre colocataires, sensés, sensibles. La majorité des gens aurait réglé l’affaire sans même y penser alors qu’elle m’a angoissé durant de longues heures. Ce matin, j’ai serré les dents et je me suis lancé.

Ce matin, j’ai compris encore une fois que « faire un homme de soi » c’est précisément être capable de faire un pas qui coûte vraiment même s’il ne nous hisse pas au rang de héro, même s’il vient seulement combler une déficience et nous permettre de faire ce que d’autres font plus naturellement, plus intuitivement.

Ce matin, dans une sphère de ma vie où j’étais encore petit, j’ai fait un homme de moi.