samedi 31 mars 2012

le monde de la corneille

Quelque part entre le sommeil et l'éveil, j'émerge doucement dans la pénombre. Avant d'ouvrir l'oeil, je connais l'heure. Une heure unique de contours et de formes, de demi-teintes grises et violettes... où les pensées profondes et volatiles vont à leur guise avant que le cadran ne se souvienne du sens des chiffres. Le monde de la corneille, m'a-t-on dit. Je n'ai pas compris.

Dans la pénombre, j'ai ouvert les yeux sans m'en apercevoir. Autour de moi, les objets ont une présence, un poids, une âme... mais aucun nom. Je regarde, j'écoute et j'existe avec eux entre la nuit et le soleil qui commence à poindre. L'obscurité délicate cédera bientôt sa place aux couleurs criantes. L'air de silence qui permet au moindre bruit de se faire entendre sera bientôt saturé de vie. La noirceur se retirera lentement comme une main de fantôme sur une harpe et le jour aura repris sa place au réveil de la horde.

Les contemplatifs, les corneilles, reprendront leur apparence humaine pour se fondre dans le tumulte du jour, imprégnés par le calme et la sagesse de l'aube. À midi, les diurnes auront chassé toute la mélancolie du monde. Le présent sera une fête. Et pour les remercier, à la tombée de la nuit, nous leur raconterons comment le soleil se lève.

dimanche 25 mars 2012

adieu instinct carnassier

J'aime la viande. Je suis carnivore... de moins en moins.

Avant nous, l'amérindien remerciait et respectait l'animal pour son sacrifice.

Avant nous, on a déploré l'insensibilité humaine devant la cruauté et on a constaté combien la passivité et la résignation devant certaines situations peuvent être lourdes de conséquences.

Je crois que j'ai intérêt, comme carnivore, à arrêter de me glorifier et de traiter les végétariens comme si c'étaient eux, les radicaux.

L'aura de virilité du mangeur de viande, la fierté de ne manger que ça et d'en manger plus que tout le monde... je ne me reconnais plus là-dedans. Je veux tendre vers la pensée amérindienne.



J'ai appris un concept en pub qui s'appelle la DISSONANCE COGNITIVE.

Devant un phénomène le fait trop souffrir, l'humain peut adopter un comportement contraire à ce qu'il croit profondément juste pour ne pas ressentir toute la douleur, la culpabilité et les toutes émotions que feraient jaillir l'acceptation de ce phénomène.

Je crois que notre fierté carnivore s'apparente beaucoup à de la dissonance cognitive... les mangeurs de viande sont probablement beaucoup plus sensibles qu'ils ne le pensent à la cause animale.

Avoir l'humilité de faire demi-tour, c'est aussi ça gagner en conscience...

[Image prise sur Facebook sur la page de Elo Antispéciste, merci pour le montage.]

vendredi 16 mars 2012

l'autre rive de la dépendance affective...

Sur l'autre rive, on n'est pas à l'abri de la marée. J'ai fait le chemin dans un sens, je peux le refaire dans l'autre. De temps en temps, je sentirai l'appel du large et j'aurai besoin de nager pour revenir au bord... mon effort à payer pour retrouver le soleil, la plage de sable blanc et les gens que j'aime.

...

J'ai déjà posé toutes mes questions sur la dépendance affective. Voici aujourd'hui une ébauche de réponse.

Je crois qu'un dépendant affectif est d'abord et avant tout une personne qui ne s'aime pas suffisamment. Une personne qui, à divers degrés, ne se sent pas digne d'être aimée.

Parce qu'il ne s'aime pas suffisamment, le dépendant affectif dépend de l'amour des autres pour s'aimer lui-même.

Parce qu'il dépend de l'amour des autres pour s'aimer lui-même, le dépendant essaie toujours d'agir de manière à ce que les autres l'aiment. Il cherche l'approbation et l'amour à tout prix, au dépend de ses propres désirs, au dépend de ses propres convictions, au dépend de sa propre personne. 

Parce qu'il se sent indigne d'amour, le dépendant est toujours en carence. Qu'on l'aime véritablement ou non, il continue de se sentir indigne d'amour! Il cherche donc sans cesse à éviter le rejet et les conflits et à prouver qu'il est digne d'amour sans jamais obtenir de confirmation définitive (puisque cette confirmation ne peut venir que de lui-même). Dès lors, il se croit perpétuellement menacé de n'être plus aimé et tous ses comportements motivés par la peur l'empêchent d'entrer en relation véritable, l'éloignent des autres et, finalement, le font sentir de plus en plus indigne d'amour. 

À ma connaissance, la seule planche de salut pour le dépendant est d'oser reconnaître et ressentir les deux aspects de départ de sa condition: un, "je ne m'aime pas suffisamment" et, deux, "je ne me sens pas digne d'être aimé".

Oser plonger dans sa perte d'estime est un processus très douloureux. C'est difficile et désagréable de s'avouer à soi-même qu'on ne s'aime pas tout-à-fait et qu'on ne s'est jamais senti complètement digne d'être aimé... ressentir très profondément cette vérité qui a guidé toute notre existence peut faire excessivement mal.

Mais en réalisant cela, on commence à s'aimer sans douter. On réalise que les gens autour nous aiment aussi réellement, pas seulement quand on fait tout pour leur plaire. On réalise qu'ils nous souhaitent véritablement de nous épanouir, même si ça veut dire qu'ils doivent faire des compromis pour nous. On réalise qu'ils en font déjà en nous pardonnant nos imperfections, de leur mieux, depuis longtemps.

En réalisant cela, on devient aussi beaucoup plus aimant. Au lieu de perdre notre énergie à donner une belle image de nous-mêmes aux autres pour qu'ils nous aiment, on parvient à se soucier sincèrement d'eux, de leurs désirs, de leur bonheur. Et notre tendance naturelle à la conciliation et notre souci de ne pas empiéter sur les autres peut être mis à profit d'une manière beaucoup plus saine.

Bienvenue sur l'autre rive!